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Wavemaker Story #4 - Lieven D'hont

Demander à emprunter plutôt qu’acheter

Comment motiver les gens à prêter et emprunter davantage, que ce soit une tondeuse ou une tonnelle ? C’est toute la question à laquelle veut répondre la plateforme de partage en ligne Peerby. Lieven D’hont, coordinateur de l’initiative, partage son expérience sur ce qui fonctionne, et explique comment il est possible, même sans gros budget marketing ni agence de pub, de grandir comme entreprise sociale dans une économie circulaire. 

Type
Wavemaker Stories
Langue
Néerlandais, Français
Thèmes

Wie is Wavemaker Lieven D’hont?

Qui est le Wavemaker Lieven D’hont ? 

Passionné par la mission de faire de l’utilisation partagée la norme, l’activiste-entrepreneur Lieven D’hont est le fondateur de l’ASBL Wijdelen, notamment à l’origine de la plateforme Peerby en Belgique. C’est lui qui a importé cette initiative d’origine néerlandaise chez nous, et il en est le coordinateur depuis son lancement en 2013. 

Lieven soutient aussi via Wijdelen six vélothèques Tata Bicyclette à Gand : un service de ‘location évolutive’ de vélos pour enfants. Il est par ailleurs le moteur du Green Deal ‘Huren en Delen’, une initiative qui rassemble la société civile, les entreprises et le gouvernement flamand afin d’encourager la location et le partage. 

 Lieven sur LinkedIn 

« Il y a toujours ‘a peer nearby’, une personne à proximité et en mesure de vous aider : c’est l’inspiration derrière l’appellation Peerby. La plateforme Peerby permet de trouver une personne à proximité, chez qui louer ou emprunter occasionnellement quelque chose, pour ne pas devoir l’acheter. Après tout, 80 % de ce que nous avons à la maison reste la plupart du temps dans un coin. Donc il y a toujours quelqu’un à proximité, avec une solution. » 

Les atouts de Peerby 

« La force de Peerby réside dans le côté facile et agréable pour trouver ou proposer du matériel. Peu de gens sont assez extravertis pour aller sonner à la porte de leurs voisins. Peerby simplifie et accélère la connexion entre l’offre et la demande. 

Nous avons 47 000 membres actifs en Flandre, et au moins 20 membres par code postal. Pour que Peerby continue à exister et à s’étendre (aussi en Wallonie), nous avons créé un modèle d’entreprise. Au contact de l’organisation néerlandaise, j’ai appris qu’il faut pouvoir valoriser sa valeur ajoutée. Nos services coûtent de l’argent, donc il faut des revenus. Nous avons examiné différentes pistes, grâce au soutien de la Fondation Roi Baudouin, et nous avons privilégié pour Peerby un modèle de paiement durable. 

Vous payez 29 euros pour emprunter ou louer du matériel pendant un an via la plateforme Peerby. Mais proposer quelque chose est gratuit : un prêteur peut choisir de prêter un objet gratuitement, ou de le louer à petit prix. Si vous louez un objet pour 10 euros, 1,5 euro va à Peerby. 

Depuis le lancement de ce modèle de paiement en 2020, nous avons constaté que les utilisateurs trouvent ce coût vraiment raisonnable. Il faut dire que les alternatives sont beaucoup plus chères, et nous offrons des avantages complémentaires. Un autre atout de Peerby consiste par exemple à proposer un fonds de garantie. Si quelque chose dérape et que les deux parties ne parviennent pas à s’arranger, une solution est toujours proposée. Peerby garantit ainsi une transaction sûre, d’un point de vue financier. 

« Les gens sont prêts à payer pour la tranquillité d’esprit et le bon ressenti donnés par Peerby. » 

Dans la pratique, nous voyons d’ailleurs que peu de problèmes sont signalés. En règle générale, les gens prennent soin du matériel des autres. Et surtout dans les sous-communautés développées pour une rue, un immeuble ou un groupe comme des amateurs de vélo (un volet sur lequel nous souhaitons miser à l’avenir), les soucis sont assez facilement résolus. Mais notre statut d’intermédiaire et notre fonds de garantie restent importants pour convaincre de nouveaux utilisateurs de rejoindre Peerby. Ils veulent se sentir en sécurité avant de faire le premier pas. » 

 

Grimper sur l’échelle des R 

« Je crois en l’économie circulaire et en l’échelle des R. Différentes stratégies existent pour réduire l’impact sur le climat des choses que l’on utilise. Pour les vêtements par exemple, les deux R de ‘Réutiliser’ et ‘Réparer’ sont de très bonnes options. Mais l’échelle des R nous joue parfois des tours. Ainsi, nous Belges sommes très doués pour ‘Recycler’, mais nous ne savons pas toujours très bien où vont toutes ces fractions à recycler.

Voilà pourquoi Peerby se concentre sur le R de ‘Repenser’, la stratégie la plus efficace sur l’échelle pour lutter contre la surconsommation et la surproduction. Nous repensons l’approche de la propriété : nous la voyons comme quelque chose que l’on peut aussi utiliser pour aider autrui. 

Cela nécessite un changement de comportement : si vous avez besoin de quelque chose que vous n’avez pas chez vous, il faut penser à l’emprunter ou à le louer à des voisins, avant d’envisager de l’acheter. C’est un gros changement, car ce réflexe est fort éloigné des habitudes de la population. Voilà pourquoi avons aussi dû repenser la communication. » 

Clés de communication

             1. Positionnement clair 

« Nous avons délibérément choisi d’être une plateforme dédiée à une seule fonction. Chez nous, il n’est pas possible (comme dans un groupe WhatsApp ou Facebook par exemple) de poster n’importe quelle question, comme ‘Qui a vu notre chat ?’, ‘Qui veut une table basse à donner ?’, ‘Des boutures de plantes, ça intéresse quelqu’un ?’, etc. Il n’y a rien de tout ça chez nous. Peerby aide juste les utilisateurs à partager et à louer, avec la certitude que rien ne peut dérailler : une ‘promesse unique’ que d’autres plateformes en ligne n’ont pas. » 

 

             2. Formulation compréhensible

« Convaincre de l’utilité de l’utilisation partagée est très complexe. Il faut commencer par expliquer cette notion d’utilisation partagée. Dans la communication, nous utilisons donc ‘louer et partager’, car ces deux infinitifs que tout le monde comprend couvrent toutes les variantes. » 

« Nous optons pour une stratégie lente mais efficace. » 

             3. Réussites des utilisateurs 

« La plateforme Peerby fonctionne très bien à l’échelle locale, donc la transition au niveau supérieur est maintenant un réel défi. Il faut du temps pour activer cette croissance et attirer davantage d’utilisateurs sur Peerby. Parce que la transition entre ‘je vais l’acheter’ et ‘je vais demander à qui je peux l’emprunter’ nécessite un changement de mentalité, et cela ne se fait pas du jour au lendemain. Ça ne marche pas avec un bombardement de publicités ou de publications sur les réseaux sociaux, ni avec une campagne coup de poing. Puis les gens sont déjà surchargés de messages à traiter tous les jours : comment faire pour transmettre le nôtre ? 

Nous y arrivons en nous concentrant sur l’esprit de communauté, et sur le contact personnel et individuel. Peerby est porté par les profils motivés par notre approche. La plateforme se développe d’une personne à une autre, puis d’un quartier à un autre, grâce à des expériences réussies avec des personnes proches de vous. Quand on prête une valise à un voisin du quartier, on reçoit en retour des conseils de voyage, un sourire et un bon sentiment. Puis vous racontez l’histoire à quelqu’un d’autre, et d’autres personnes apprennent ainsi l’existence de Peerby, ce qui peut aussi motiver à utiliser davantage la plateforme vous-même.  

C’est ce contact personnel dans un quartier, facilité par la plateforme numérique, qui fait que de plus en plus de personnes s’inscrivent chaque jour sur Peerby. Mais cette approche de communauté prend du temps. ‘Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin’ : cela vaut pour nous aussi. Nous optons pour une stratégie lente, mais très efficace. » 

« Peerby est porté par les profils motivés par notre approche. » 

             4. Ambassadeurs bénévoles 

« Les utilisateurs peuvent se proposer pour devenir ambassadeurs. Un ambassadeur reçoit alors de notre part un colis de 500 à 2000 courriers à distribuer dans son quartier. Nous rédigeons ce courrier en concertation avec l’ambassadeur, pour qu’il parle vraiment aux habitants du quartier. Et pour que les voisins retiennent qu’il y a beaucoup de matériel disponible à proximité : c’est bon à savoir pour le jour où ils veulent organiser un événement et qu’ils ont besoin d’une tonnelle. » 

             5. Messages-relais 

« L’utilisation partagée est une utilisation planifiée. On n’a pas souvent besoin des objets et outils partagés et loués sur Peerby. Il faut penser au moment où l’on va prendre quelque chose, quand on va l’utiliser, puis le rendre. Ça ne nous avantage pas face aux grands webshops, qui fixent aujourd’hui encore la norme : ‘si vous voulez quelque chose, c’est livré chez vous en quelques clics’. Mais alors, comment faire pour faire penser à Peerby en premier dès que quelqu’un a besoin de quelque chose ? 

C’est à ça que servent les relais créés à partir de la plateforme en ligne. Vous pouvez choisir de recevoir une notification, un SMS ou un e-mail chaque fois qu’il y a de nouvelles demandes de la part de personnes du quartier. Ainsi, Peerby attire régulièrement l’attention pendant une fraction de seconde. Cela renforce le réflexe de penser à louer ou partager au bon moment, plutôt que d’acheter. » 

 

             6. Priorité au pouvoir d’achat  

« Nous communiquons sur l’impact écologique, tout en réalisant bien que ce n’est pas la principale motivation des utilisateurs pour partager ou louer plus de matériel. Si nous voulons nous développer, nous devons absolument miser sur une rentabilité économique : plus de pouvoir de partage, c’est plus de pouvoir d’achat. A fortiori dans un monde où les dirigeants peuvent d’un coup réduire notre pouvoir d’achat, et où un bateau peut bloquer le canal de Suez. » 

 

Voir les possibilités 

« Il y a dix ans, nous sommes partis de l’idée que nous devrions pouvoir tout partager. Et aujourd’hui, cet objectif est déjà nettement plus proche. Même avec toute une série de choses imprévisibles en cours de route : coronavirus, IA, guerres... Si nous réussissons, c’est parce que nous voyons chaque jour de nouvelles possibilités. Nous osons essayer, et recommencer. 

Aux entrepreneurs qui essaient de résoudre une problématique de société, je voudrais dire : c’est vous qui verrez où ça vous mène, car c’est vous qui voyez les possibilités. La capacité de visualiser les objectifs et les opportunités est un don unique que seuls les vrais acteurs du changement possèdent. Osez vous appuyer sur cette force. Vous allez sentir des vents contraires, mais en gardant les pieds bien vissés dans les fondements de votre projet, rien ne pourra vous emporter. » 

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